La Fabrique de la Cité, think tank sur la prospective urbaine créé par le groupe VINCI, accueillait mardi 28 mai une conférence-débat sur les nouveaux aménagements territoriaux liés à la problématique des commerces en ville. Alors que le modèle fordiste est aujourd’hui critiqué, il s’agissait de rendre compte d’autres phénomènes comme la contestation liée aux grands projets d’aménagements commerciaux ou de l’arrivée des centres commerciaux en centre-ville.

Philippe Dugot, professeur et directeur du département de géographie à l’Université Toulouse Jean Jaurès, a d’abord mis l’accent sur le fait que l’on se trouvait actuellement en phase d’accélération des mutations commerciales. Des mutations qui ouvrent une période d’incertitude, en particulier avec le développement du e-commerce qui représente aujourd’hui environ 9% des ventes au détail en France. Selon lui, le modèle fordiste n’est toutefois pas fini puisqu’on trouve encore 1900 hypermarchés en France et que la chaîne néerlandaise Action s’implante dans l’Hexagone à grande échelle. L’opportunité selon lui pour un secteur en constante mutation ? Repenser et reconstruire le commerce en lui agrégeant d’autres fonctions.

Une idée confirmée par Dorian Lamarre, directeur des relations institutionnelles et extérieures au Conseil National des Centres Commerciaux. Il a ainsi confirmé l’explosion du « retailtainment », concept incluant la création d’espaces de loisirs au sein de centres commerciaux auparavant uniquement dédiés au commerce. Et souligné que si les centres commerciaux se trouvaient encore il y a quelques années en périphérie, cette situation changeait progressivement du fait de l’étalement urbain : un centre commercial sur cinq en France se trouve désormais en centre-ville, représentant un vrai pôle d’attractivité pour certaines enseignes. Quant au e-commerce, il a jugé que sa concurrence avec le commerce physique était biaisée du fait que les enseignes digitales ne contribuaient pas à l’aménagement du territoire (les enseignes physiques payent 90 taxes différentes dont 35 seulement sur le foncier) et échappaient également à l’impôt sur le revenu.

En conclusion, Cécile Maisonneuve, présidente de La Fabrique de la Cité, a évoqué le modèle Amazon, qui a tué la concurrence avec ses livraisons de tout à tout moment. Un modèle qui pose toutefois la question de la logistique urbaine : en commandant beaucoup sur internet, on accepte de se faire livrer par des camions roulant au diesel, à l’heure où les prises de conscience écologiques sont plus que nécessaires. Ce qui pousse Philippe Dugot à s’interroger sur la responsabilité du consommateur face au e-commerce, dont l’empreinte sociale et écologique est énorme : selon lui, la marge de choix doit nous permettre d’avoir en France une influence sur les modes de commerce que l’on souhaite voir se développer. Et décider ainsi de la ville à laquelle on aspire pour demain.

www.lafabriquedelacite.com/