Leonard, la plate-forme de prospective et d’innovation du Groupe VINCI, organisait ce mercredi matin la quatrième conférence du cycle sur l’hydrogène qu’elle organise avec la Société pour l’Encouragement de l’Industrie Nationale. Au programme ce matin, la mobilité hydrogène sur route et sur rails, en présence de Elise Bon (VINCI Autoroutes), Sylvain Hété (Toyota) et Stéphane Kaba (Alstom). Les débats étaient animés par Pierre Delaigue, directeur des Projets mobilités connectée, électrique et autonome chez Leonard.
Elise Bon a ouvert les échanges en rappelant que le secteur des transports était responsable en France de 29 % des émissions de gaz à effet de serre et que l’objectif était d’atteindre la neutralité carbone en 2050. « Il est nécessaire de décarboner l’usage de la route, car le report de la part modale sur des mobilités moins carbonées ne suffira pas », a prévenu Elise Bon avant d’énoncer ce que VINCI Autoroutes pouvait faire en ce sens : encourager le covoiturage (pour remplir plus les véhicules) en construisant des parkings dédiés et des voies réservées, et favoriser la pénétration de véhicules décarbonés sur son réseau. De plus, comme la stratégie bas carbone mise aujourd’hui beaucoup sur le véhicule électrique, il est important de prévoir des infrastructures de recharge pour répondre à la demande.
Concernant l’hydrogène, VINCI Autoroutes tire les conclusions suivantes : il y a un réel besoin de passer à l’échelle pour la production d’hydrogène décarboné et il s’agit, pour la route, de d’abord le réserver aux poids lourds et aux véhicules utilitaires légers. Elise Bon a conclu son intervention en évoquant les différents travaux de veille et les projets en cours comme celui de station hydrogène (actuellement en phase d’avant projet) dans le quartier Croix Daurade de Toulouse où VINCI Autoroutes possède un centre d’exploitation pour ses fourgons. Objectif : fournir à terme 420 kilos d’hydrogène par jour.
Des solutions complémentaires
Sylvain Hété a ensuite pris la parole pour présenter la stratégie de Toyota en matière d’hydrogène. Il a en préambule donné quelques chiffres sur la marque japonaise : 9,5 millions de véhicules vendus dans le monde en 2020 et 8,5 milliards d’euros investis en R&D ; en France, ce sont près de 102 000 voitures qui ont été vendues l’année dernière dont 62,7 % en Full Hybrid. Toyota a pour objectif de construire 5,5 millions de véhicules électrifiés d’ici 2025, dont un million à zéro émission.
Cet objectif répond notamment au Toyota Environmental Challenge 2050 qui s’est fixé six points clés : zéro émission de CO2 pour les véhicules neufs, zéro émission de CO2 tout au long du cycle de vie (des matières premières au recyclage), zéro émission pour les sites de production, limiter et optimiser la consommation d’eau, bâtir des solutions et une société fondée sur le recyclage, et promouvoir l’avènement d’une société en harmonie avec la nature.
Sylvain Hété a également rappelé que les solutions de décarbonation des mobilités étaient complémentaires : l’électrique à batterie pour un usage courts trajets, l’hybride et l’hybride rechargeable pour les trajets moyens et la pile à combustible pour les longs trajets. Mais l’hydrogène reste au coeur de la stratégie Toyota pour 2050. Le groupe japonais va d’ailleurs multiplier les usages de la pile à combustible (pour la mobilité donc, mais aussi pour les groupes électrogènes et à travers trois partenariats concrets avec prise de participation).
Les partenaires en question ? EODev, qui équipe via REXH2 le premier bateau à hydrogène au monde), HYSETCO avec lequel Toyota entend développer un écosystème hydrogène à Paris (avec les taxis HYPE) pour ensuite le déployer auprès d’autres opérateurs et qui souhaite remplacer 600 véhicules diesel par des Mirai – 5,6 kilos d’hydrogène en capacité réservoir pour 665 kilomètres d’autonomie – ainsi qu’ouvrir deux nouvelles stations), et CAETANO pour les bus à hydrogène (un test est actuellement en cours avec la RATP en région).
Les trains régionaux et le fret en première ligne
Pour conclure la conférence, Stéphane Kaba a dressé un bilan du réseau ferré européen qui n’est électrifié qu’à 50 % aujourd’hui ; en France, il y a environ 33 000 kilomètres de voies ferrées, dont 40 % qui ne sont pas électrifiés. Il a ensuite expliqué que la hausse du prix du diesel et sa taxation poussait à trouver des alternatives, tout comme la nécessité de protéger l’environnement et de réduire les bruits, ainsi que l’apparition des Zones à Faibles Emissions (ZFE). Tout cela devrait favoriser l’émergence des solutions à hydrogène notamment.
Concrètement, pour ce qui est des trains de voyageurs régionaux, il s’agit par exemple de retirer les packs diesel pour les remplacer par une pile à combustible, un stockage hydrogène à 350 bar et une batterie. Le défi consiste à garder la même capacité (environ 150 passagers) et donc à trouver des solutions techniques pour intégrer ces différents éléments sans perte. Ce changement d’énergie permet d’économiser 700 tonnes de CO2 par train, soit l’équivalent d’environ 400 voitures. Des expérimentations sont déjà en cours en Allemagne avec Coradia iLint qui démontrent la stabilité de cette technologie. Stéphane Kaba a également précisé qu’Alstom souhaitait participer au « verdissement du fret » (fret lourd et locomotives de manoeuvre) qui est très polluant.