Dans le cadre de son cycle « Grands projets et démocratie », La Fabrique de la Cité accueillait mercredi 20 février le Tribunal pour les Générations Futures du magazine Usbek & Rica. Une conférence-débat sous forme de procès avec Florie Debailleux dans le rôle de la présidente pour superviser les échanges et quatre témoins appelés successivement à la barre pour répondre aux questions de la procureure Charlotte Dekoker (« Non, il ne faut pas laisser les citoyens décider ») et de l’avocat Vincent Edin (« Oui, il faut laisser le dernier mot aux citoyens ») :
  • Marion Roth, directrice du think tank Décider ensemble
  • David Lebon, directeur du développement d’EuropaCity
  • Audrey Linkenheld, conseillère municipale à la mairie de Lille
  • Catherine Larrère, philosophe spécialisée dans l’éthique de l’environnement
Quatre jurés ont également été tirés au sort dans l’assemblée pour rendre leur verdict à l’issue de la séance. Le tout sous l’œil aiguisé de Xavier Gorce, illustrateur et père des Indégivrables qu’il dessine régulièrement pour lemonde.fr.

L’événement prenait évidemment une dimension toute particulière en pleine crise des Gilets Jaunes. L’occasion pour Marion Roth de rappeler que le Grand débat national est une consultation et non une concertation : ici, le citoyen n’aura pas le dernier mot. Exemple de l’Assemblée citoyenne irlandaise à l’appui, Marion Roth a donc rappelé l’importance de mettre en place des dispositifs de concertation pour permettre aux citoyens de participer à l’élaboration d’un projet d’aménagement et de ne pas être simples spectateurs.

Que penser alors du grand projet d’aménagement EuropaCity, mégacomplexe commercial, touristique et sportif qui doit voir le jour sur les terres agricoles du Triangle de Gonesse (Val-d’Oise) ? David Lebon a défendu son projet bec et ongles, avançant qu’il avait l’ambition de redonner vie à des territoires périphériques délaissés.

Souvent dans la ligne de mire de citoyens qui ne sentent pas écoutés, les élus ont un rôle important à jouer en amont en matière de grands projets d’aménagement. Audrey Linkenheld a ainsi défendu leur rôle devant la cour : les élus sont les représentants du peuple et défendent l’intérêt général quand certains citoyens pensent d’abord à défendre leurs propres intérêts. Elle a également mis en avant un point important : dans le cadre de grands projets d’aménagement, il ne faut pas se limiter à consulter les habitants directement concernés, mais élargir consultations et concertations à l’ensemble d’un territoire.

Dans un contexte parfois tendu, quelle place doit-on donc accorder aux citoyens dans la conception de ces grands projets ? Pour Catherine Larrère, l’un des grands enjeux de la concertation, indissociable de tout grand projet, est de garantir la pluralité des opinions et la liberté du débat. Mais elle rappelle aussi qu’être citoyen, c’est avant tout faire ce que l’on doit et non ce que l’on veut.

Verdict ? Deux des jurés se sont rangés derrière l’avis de la procureure, les deux autres ont suivi l’avocat et le public a tranché : oui, les citoyens doivent avoir le dernier mot en matière de grands projets d’aménagement.

Pour visualiser le texte avec l’ensemble des illustrations de Xavier Gorce, télécharger le pdf ci-joint.

https://www.lafabriquedelacite.com/